Exécution du contrat de travail

1. Quelles sont les règles régissant l’exécution du contrat de travail ?

En droit interne, en dehors des dispositions légales et règlementaires, l’exécution du contrat de travail est régie par le contrat lui-même bien entendu ainsi que par les conventions et accords collectifs applicables. Il convient également d’ajouter :

  • les usages au sein de l’entreprise et les éventuels engagements unilatéraux de l’employeur,
  • le règlement intérieur.

2. Qu’est-ce qu’une faute disciplinaire ?

Une faute disciplinaire est un manquement résultant d’un comportement volontaire du salarié.

Le caractère volontaire de l’acte va ainsi permettre de différencier la faute professionnelle de la simple insuffisance professionnelle, qui ne constitue pas en elle-même une faute. Pour que l’insuffisance professionnelle soit qualifiée de faute, il faut qu’elle résulte d’une abstention volontaire ou d’une mauvaise volonté délibérée du salarié (Cass. soc. 25 janvier 2006, n°04-40310 ; Cass. soc. 27 novembre 2013, n°12-19898).

Dans certaines situations, il peut néanmoins s’avérer délicat de distinguer l’insuffisance professionnelle de la faute disciplinaire. Chaque cas de figure doit dès lors être examiné très concrètement et précisément.

Seules peuvent par ailleurs être sanctionnées les fautes commises dans le cadre de la vie professionnelle du salarié. Les faits relevant de sa vie privée ne peuvent faire l’objet de sanctions. Il convient néanmoins de souligner que certains actes, même commis en dehors du temps et du lieu de travail, peuvent se rattacher à la vie professionnelle et justifier une sanction disciplinaire. Sur ce point, le juge procède là encore à une appréciation très concrète en fonction de chaque cas de figure, afin de déterminer si tel ou tel comportement peut ou non être rattaché à la vie professionnelle de l’intéressé.

L’analyse de chaque situation est donc nécessaire et bien souvent, tant les salariés que les employeurs ont intérêt à se faire conseiller.

3. Qu’est-ce qu’une sanction disciplinaire ?

Constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par l’employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération (article L. 1331-1 du code du travail).

Les amendes ou autres sanctions pécuniaires sont interdites (articles L. 1331-2 du code du travail).

Le règlement intérieur de l’entreprise, lorsque l’employeur est tenu d’en établir un, détermine la nature et l’échelle des sanctions applicables et dans ce cas, l’employeur ne peut pas prononcer une sanction qui ne serait pas prévue par le règlement intérieur (Cass. soc. 26 octobre 2010, n°09-42740).

La procédure disciplinaire obéit à des règles précises, sachant que les dispositions législatives et règlementaires se cumulent avec les règles éventuellement posées par la convention collective applicable.

D’une manière générale, parmi les règles applicables, on mentionnera que :

  • lorsque l’employeur envisage de prendre une sanction, il doit convoquer le salarié en lui précisant l’objet de la convocation, sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature n’ayant pas d’incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l’entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié (article L. 1332-2 du code du travail),
  • aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales (article L. 1332-4 du code du travail),
  • lorsque la sanction n’est pas de celles qui doivent faire l’objet d’un entretien préalable, il résulte de l’article L. 1332-4 du code du travail qu’elle doit être notifiée au salarié dans le délai de 2 mois à compter du jour où l’employeur a eu connaissance du fait fautif,
  • lorsque la sanction est de celle devant donner lieu à un entretien préalable, La sanction ne peut intervenir moins de deux jours ouvrables, ni plus d’un mois après le jour fixé pour l’entretien (article L. 1332-2 du code du travail). Attention, ce délai d’un mois s’applique y compris lorsque la sanction est un licenciement.

4. Que risque un employeur qui ne rémunère pas les heures supplémentaires d’un salarié ?

Les heures supplémentaires effectuées par un salarié peuvent être soit récupérées par ce dernier sous forme de jours de repos, soit payées.

Lorsque tel n’est pas le cas, l’employeur s’expose bien évidemment à se voir condamner à un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires non payées, avec intérêts de retard mais ce n’est pas tout.

Quand le nombre d’heures supplémentaires effectuées dépasse le contingent annuel d’heures supplémentaires (qui est de 220 heures à défaut d’accord collectif contraire), le salarié a droit à une « contrepartie obligatoire en repos » dont la durée dépend de la taille de l’entreprise. Dès lors, si le salarié a effectué des heures supplémentaires (qu’elles aient été payées ou non) au-delà du contingent annuel sans bénéficier des contreparties obligatoires en repos auxquelles il avait droit, il peut également aussi solliciter des dommages et intérêts à ce titre.

Lorsque le contrat de travail est rompu, si les pièces du dossier révèlent que l’employeur a intentionnellement mentionné sur les bulletins de salaire un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli par le salarié, ce dernier peut obtenir du juge prud’homal la condamnation de l’employeur à lui verser une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé égale à six mois de salaire (articles L. 8221-5 et L. 8223-1 du code du travail).

Soulignons enfin que le travail dissimulé est un délit pénal, les peines principales en l’absence de circonstance aggravante pouvant aller jusqu’à 3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende (article L. 8224-1 du code du travail).

5. Quelle est l’étendue de l’obligation de sécurité de l’employeur à l’égard de ses salariés ?

L’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs (articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail). L’article L. 4121-1 porte sur les mesures devant être prises par l’employeur et l’article L. 4121-2 énumère quant à lui les principes généraux de prévention sur le fondement desquels ces mesures doivent être prises (éviter les risques, adapter le travail à l’homme, etc.).

Depuis 2002, les juges considéraient qu’il s’agissait d’une obligation de sécurité de résultat (jurisprudence constante depuis Cass. soc. 28 février 2002, n°00-11793). Cela impliquait que la responsabilité de l’employeur était automatiquement engagée dès lors qu’il est porté atteinte à la sécurité ou à la santé du salarié (ou qu’il risquait de l’être) et ce, quelles que soient les mesures de prévention que l’employeur avait pu prendre.

Récemment, cette approche a néanmoins été remise en cause par la Cour de Cassation, qui, tout en continuant à utiliser le terme d’« obligation de sécurité de résultat », a jugé que l’employeur respectait cette obligation lorsqu’il justifiait avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail (Cass. soc. 24 novembre 2015, n°14-24444).

Cette évolution (que l’on peut désormais, à notre sens, qualifier de revirement de jurisprudence) a été confirmée par un arrêt de la Cour de Cassation en date du 1er juin 2016, rendu en matière de harcèlement moral. Pour la première fois, la Cour a considéré que ne méconnaît pas son obligation de sécurité l’employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures de prévention prévues par le code du travail ainsi que les mesures immédiates propres à faire cesser des faits susceptibles de caractériser un harcèlement moral dès qu’il en a été informé (Cass. soc. 1er juin 2016, n°14-19702).

6. Aperçu du harcèlement moral au travail

Le présent paragraphe est consacré à l’appréciation du harcèlement moral par les juridictions prud’homales (étant précisé que le harcèlement moral est aussi une infraction pénale mais l’aspect pénal n’est pas évoqué ci-dessous).

Selon l’article L. 1152-1 du code du travail, « aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».

Autrement dit, les agissements sanctionnés sont des agissements répétés, un acte isolé ne constituant jamais du harcèlement moral pour le juge prud’homal.

Il n’est pas nécessaire que l’auteur du harcèlement ait une intention de nuire.

De plus, le harcèlement moral peut dans certains cas être caractérisé par des méthodes de gestion.

Le harcèlement moral n’implique pas nécessairement un rapport hiérarchique : il peut parfaitement émaner d’un collègue de même niveau voire d’un subordonné.

Le harcèlement moral étant difficile à caractériser, le mode de preuve est aménagé : depuis mai 2008, l’article L. 1154-1 du code du travail prévoyait que le salarié concerné devait « établir des faits qui permettent de présumer » l’existence d’un harcèlement. La loi « Travail » du 8 août 2016 a modifié cet article du code du travail en indiquant qu’il revient au salarié « de présente[r] des éléments de fait laissant supposer » l’existence d’un harcèlement (ce qui est plus souple). Au vu de ces éléments, il incombe au défendeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement (article L. 1154-1 alinéa 2).