Harcèlement moral : l’employeur n’est plus systématiquement responsable

Harcèlement moral : l’employeur n’est plus systématiquement responsable

Jusqu’à présent, dès lors qu’un salarié était victime de harcèlement moral, l’employeur était systématiquement considéré comme responsable.

L’employeur est en effet tenu envers ses salariés d’une obligation de sécurité car il doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs (articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail).

La jurisprudence jugeait traditionnellement qu’il s’agissait d’une obligation de sécurité de résultat (Cass. soc. 28 février 2002, n°00-11793). Autrement dit, dès lors qu’il était porté atteinte (ou qu’il risquait d’être porté atteinte)  à la santé ou à la sécurité d’un salarié, la responsabilité de l’employeur était automatiquement engagée, quelles que soient les mesures qu’il avait pu prendre.

A la fin de l’année 2015, la Chambre sociale de la Cour de Cassation a infléchi la portée de l’obligation de sécurité pesant sur l’employeur, puisqu’elle a jugé, à propos d’un chef de cabine à Air France ayant été victime d’une crise de panique plusieurs années après les attentats du 11 septembre 2001, que « ne méconnaît pas l’obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, l’employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail » (Cass. soc. 24 novembre 2015, n°14-24444).

Restait à savoir si l’affaiblissement de la portée de l’obligation de sécurité de l’employeur allait s’appliquer en matière de harcèlement moral.

Depuis un arrêt en date du 1er juin 2016, la réponse est positive car la Chambre sociale de la Cour de Cassation a jugé que « ne méconnaît pas l’obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, notamment en matière de harcèlement moral, l’employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures de prévention prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail et qui, informé de l’existence de faits susceptibles de constituer un harcèlement moral, a pris les mesures immédiates propres à le faire cesser »(Cass. soc. 1er juin 2016, n°14-19702).

Cette solution constitue un revirement de jurisprudence. Elle permet de valoriser l’action des employeurs en matière de lutte contre le harcèlement moral. Encore faudra-t-il, pour que leur responsabilité soit écartée, qu’ils aient mis en oeuvre toutes les mesures obligatoires et nécessaires. Ce revirement pourrait avoir pour autre conséquence une augmentation des mises en cause de personnes physiques (considérées comme le ou les auteurs du harcèlement) devant la juridiction prud’homale.